Domaine Scamandre

Un projet d'agroforesterie


Depuis 2011, le Domaine Scamandre, situé près des étangs de la Petite Camargue, plante des arbres au milieu des vignes et en limite de parcelles. Franck Renouard, le propriétaire de l’exploitation, nous explique pourquoi.

Où en êtes-vous de votre projet ?
En trois ans, nous avons déjà planté un millier d’arbres, la plupart en limite de parcelles et une trentaine au milieu des rangs. Il s’agit principalement d’oliviers, de chênes, de noisetiers, de charmes, de platanes, de cerisiers, de figuiers, de pêchers et d’arbousiers. Au total, on compte trente-trois essences différentes. À terme, nous aurons replanté trois mille arbres, soit un kilomètre de haies sans compter les arbres isolés.

Qu’est-ce qui vous a poussé à vous engager dans cette démarche ?
Un vigneron sait qu’il n’y a pas de grand vin sans bonne grappe et qu’il n’y a pas de bonne grappe sans un sol vivant et sain. Depuis que nous avons créé le domaine, en 2003, notre ambition a toujours été celle-ci : rendre le sol le plus vivant possible. Et l’agroforesterie – la pratique de planter des arbres près des cultures ou en plein champ – y participe.

De quelle façon ?
Les études montrent que la présence d’arbres augmente la qualité des cultures car les racines en sous-sol aident à remonter l’eau et donc à réduire le stress hydrique. D’autre part, en multipliant les zones de contact, ils favorisent une vie biologique plus riche, ce qui est utile au vigneron, parce que cela vivifie le sol mais aussi parce que cela permet de diminuer la pression parasitaire.

En permettant l’installation de prédateurs ?
Exactement. La biodiversité est souvent très faible en monoculture et la vigne est une monoculture. Or, plus la biodiversité est pauvre, plus il y a des chances qu’une espèce nuisible ne soit pas régulée et prolifère. À l’inverse, des arbres bien choisis favoriseront le retour d’insectes et de chauve-souris qui viendront chasser les parasites de la vigne et limiter les dégâts aux cultures.

Planter des arbres, c’est donc un choix pragmatique ?
Oui ! Je ne sais si c’est ma formation de chirurgien-dentiste qui le veut mais l’agroforesterie, comme le choix de travailler en bio d’ailleurs, relève pour moi d’une approche scientifique et non de la croyance ou de la foi. Je me répète, ma démarche est fondamentalement utilitariste au départ : il s’agit de savoir quoi faire pour avoir le meilleur sol possible !

Comment expliquer ainsi que les projets en agroforesterie sont encore rares ?
C’est la prise de conscience qui pose problème car l’investissement financier n’est pas très coûteux. Il faut savoir se situer sur le long terme. Les résultats ne sont jamais immédiats, ce qui n’est pas facile à accepter pour nos psychologies modernes... Cela dit, j’ai quand même l’impression, en quatre ans, d’une plus grande diversité en insectes et en oiseaux. Mais il est fort possible aussi que notre regard soit plus attentif et permette simplement de voir ce que nous ne savions voir avant !

Techniquement, se lancer dans un projet agroforestier, est-ce difficile ?
Pas tellement puisqu’on peut être accompagné. J’ai moi-même bénéficié d’un suivi par le bureau d’études Agroof, basé à Anduze, qui a aidé au choix des essences et à la détermination des emplacements. En plus, nous ne nous situons pas dans des savoirs nouveaux mais dans des savoirs anciens, que l’on retrouve aujourd’hui ! Dans le voisinage, les anciens me disent que, dans le passé, il y avait des arbres partout ici, y compris au milieu des vignes, jusqu’à ce qu’ils soient arrachés lors de la mécanisation. Les vignerons faisaient de l’agroforesterie sans le savoir ! Je m’inscris dans leurs pas.

Domaine Scamandre : www.scamandre.com
Agroof : www.agroof.net
 

publié le 01 décembre 2014